Infobf.net : Comment se porte aujourd’hui Maxime KABORE ?
Maxime KABORE : Je suis en pleine forme, je vais bien je suis entre la Belgique et le Burkina Faso. Je mène mes activités académiques. Comme vous le savez, j’enseigne dans des universités ici au Burkina Faso. La jeunesse, c’est le fer de lance de la nation et elle doit être bien formée. Nous participons à l’éveil des consciences.
On sait que vous vivez et travaillez en Belgique, alors que devient votre parti politique, le PIB ?
Ah ! Le problème c’est que les activités des partis politiques sont suspendues actuellement. Sinon, nous sommes là, on observe, on n’aime pas être dans l’agitation, ce qui importe c’est de continuer à maintenir les militants dans un regard assez constructif sur le pays et c’est bien dommage que l’on perçoive les hommes politiques actuellement comme étant des trouble-fêtes, même si certains se sont illustrés dans le passé comme étant des gens intéressés par l’argent ou le pouvoir, nous, nous sommes simplement pour l’animation de la vie politique dans le sens de l’éveil des consciences en formant nos militants et c’est clair qu’aujourd’hui avec les moyens de communications, les réseaux sociaux, ils ont la possibilité de s’exprimer, de débattre et c’est ça aussi notre rôle. Je pense que la politique, c’est être là où le besoin se fait sentir et plusieurs fois nous avons été présents pour parrainer des activités allant dans le sens des déplacés internes mais nous n’avons pas voulu médiatiser car nous estimons qu’exhiber les gens, les prendre dans leur misère et venir étaler, juste pour faire de la communication, ce n’est pas bien.
Le Burina Faso est tenaillé par des terroristes depuis près de 7ans, quelle est la perception des burkinabè qui vivent loin de leur patrie, sur la situation de leur pays ? sont-ils confiants ? méfiants ?
Je crois qu’il y a une inquiétude, une inquiétude croissante parceque jusqu’à un certain passé, on était épargné de cette difficulté qu’est le terrorisme au point où on en vient déjà à regretter la période Blaise Compaoré. A cette époque, même si les gens disaient que le pays n’était pas bien gouverné et qu’il y a eu l’insurrection populaire, il y avait quand-même une certaine accalmie qui faisait en sorte que les gens pouvaient se déplacer, aller et venir sans avoir à craindre mais aujourd’hui, ce n’est plus le cas. Plusieurs fois, le régime Compaoré a été accusé d’être à l’origine de transactions de terroristes pour que son pays soit épargné mais les gens aussi se demandent est-ce que malgré tout ça, le pays n’était pas en paix ? donc l’un dans l’autre ceux de la diaspora se posent beaucoup de questions sur l’avenir du pays. Maintenant avec le terrorisme que nous connaissons, il y a une véritable crainte. N’oubliez pas que chaque burkinabè qui est à l’extérieur du pays est un ambassadeur pour le pays, on essaie de vendre l’image du pays, on en parle aussi à des personnes qui pourraient venir et y investir donc vous comprenez que lorsque le pays est dans une situation pareil, c’est risqué et ça nous met dans une posture difficile. Mais on trouve aussi que malgré la crise, les gens continuent de vivre une vie de luxe dans les grandes villes et nous ne comprenons pas. Etant à l’étranger, chaque jour que Dieu fait, nous sommes sollicités pour des vivres, des soins de santé, des frais de scolarités et autres, pour nos parents qui sont restés au pays et on se bat comme on peut pour le faire, mais il n’y a pas que ça.
Quelle est selon vous, la meilleure forme de contribution que la diaspora peut apporter au pays pour aider à lutter contre le terrorisme ?
Très bien ! je crois que souvent, on oublie l’expertise de la diaspora. Dans cette lutte contre le terrorisme, je crois que la diaspora, au-delà des moyens financiers qu’elle peut apporter, il y a l’expertise humaine et aussi son implication. Les gens ont tendance à dire, oui, vous qui êtes à l’étranger, apportez-nous les Euros mais ne vous mêlez pas de la vie du pays parceque vous n’en savez rien, c’est archi-faux ! Moi je sais beaucoup de choses du pays plus que des gens qui vivent ici. Quand je suis là, je suis souvent étonné de voir que j’ai des informations que des gens qui sont sur place même n’ont pas sur la situation du pays, voyez-vous ? Et je trouve dommage que cette diaspora qui a une expertise diversifiée sur pratiquement tous les domaines ne soit pas sollicitée, ne soit pas utilisée quand le pays traverse des difficultés comme c’est le cas actuellement. Ce capital humain est inexploité et c’est malheureusement un savoir qui reste à l’étranger, il faut que les choses changent. On ne peut pas continuer à dire venez, apportez vos devises et restez loin, non ça ne marche pas ainsi.
Quel est votre avis sur la Transition en cours et sur son Président, le Capitaine Ibrahim Traoré ?
Je crois que c’est un jeune qui a la tête sur les épaules, un jeune qui aime son pays et qui a le sens très élevé du patriotisme. Le Capitaine Ibrahim Traoré connait certaines réalités du terrain parcceque lui-même a souffert dans sa vie, il n’est pas sorti d’une classe favorisée, il a fait l’université de Ouagadougou et je connais des étudiants que j’ai formé qui sont promotionnaires à lui et qui disent du bien de lui. Il a le sens de l’honneur et je crois que ce qu’il est en train de faire, c’est de redonner cette dignité, cette fierté au burkinabè comme au temps de la révolution parceque nous ne pouvons pas continuer à crier que nous sommes indépendants et continuer à mendier notre souveraineté. Le Capitaine Ibrahim Traoré nous fait comprendre que le développement doit être androgène, construire le pays par nous-même, il faut produire burkinabè et consommer burkinabè, il faut travailler à réveiller l’esprit de la révolution parce que cette révolution de Thomas Sankara a été malgré tout très bénéfique pour le Burkina Faso et c’est à cela qu’il faut revenir, moi je suis un révolutionnaire convaincu. Les burkinabè doivent se mobiliser actuellement pour montrer que l’intérêt supérieur de la nation prime sur les considérations partisanes. Je crois que la transition actuelle est entrain de prendre un chemin qui va ressembler d’avantage les burkinabè autour d’un idéal fort et c’est au grand bonheur de tout le pays. Le seul danger que je vois ici, c’est de constater que parmi les soutiens du jeune Capitaine, il y a certaines personnes qui se sont radicalisés et qui ont toujours un discours qui n’est pas de nature à favoriser la cohésion sociale et c’est ce qui est dommage. Il faut comprendre que la rue ne peut pas être une boussole pour le gouvernant parcequ’il y a certains enjeux qui échappent à la masse. On ne peut pas forcer les gens à le soutenir, donc il faut laisser tout un chacun s’exprimer, par contre je dis aussi qu’il faut que nous soyons dans la critique constructive si non on ne s’en sortira pas. Nous devons tout faire pour que le Capitaine réussisse parceque s’il échoue c’est tout le pays qui a échoué et ça sera dramatique.
. Maxime Kaboré, président du Parti Indépendant du Burkina (PIB)
Sur le plan diplomatique, notamment nos relations avec les partenaires, les autorités ont demandé le départ de la Force spéciale française Sabre. Quelle analyse faites-vous du sujet ?
Je crois que c’est une décision qui est souveraine et je ne vois même pas pourquoi les gens s’excitent. Les clauses entre la France et le Burkina Faso étaient bien claires, chacune des parties pouvait demander la fin des accords moyennant un préavis d’un mois et c’est ce que la partie burkinabè a fait, c’est du droit et c’est sans polémique. Je pense qu’on ne peut pas dire une chose et son contraire. Dire que les forces françaises sont dans des pays qui sont demandeurs, c’est ce que Macron a dit, et quand ces pays demandent maintenant leur départ ça fait un tollé mondial, qu’est-ce qui se cache derrière cette volonté de rester à tout prix ? Je crois que ces accords n’ont pas été souvent bien réfléchis dans l’intérêt des burkinabè ou en tout cas, des africains et quand on regarde cette hégémonie de la France, cette tendance impérialiste à vouloir nous imposer les choses, nous infantiliser et nous ridiculiser comme au temps de la colonisation, on ne peut pas l’accepter. Nous ne sommes pas contre le peuple français, nous sommes contre le système qui veut continuer à nous exploiter et chercher à nous dominer. Y’en a marre, je crois que ce n’est pas un mimétisme par rapport au Mali et d’ailleurs, même si c’est le cas, plaise à Dieu si tous les africains pouvaient prendre conscience et suivent le même pas. Comment comprendre que cette armée française qui dit avoir du matériel, des drones capables de détecter une aiguille au sol, ne soit pas à mesure voir des colonnes de terroristes qui se déplacent à moto au sol et les signaler à nos FDS ne serait-ce que par amitié ? Nous avons tout dans notre sous-sol, les gens convoitent, ils viennent prendre, ils repartent et ne veulent pas que vous bronchez, non il faut que ça s’arrête. Moi je suis un révolutionnaire convaincu et je milite pour qu’il ait une vraie révolution pour que l’occident comprenne les choses.
Justement, le Burkina décide de mener le combat contre le terrorisme avec des burkinabè par le recrutement de VDP. Pensez-vous que c’est la bonne option ?
Ah oui je suis convaincu que c’est la solution. Souvenez-vous du temps de la révolution, chaque village était organisé et dès qu’un étranger y met le pied, tout le village est informé qu’il y a quelqu’un dans tel famille. Ce sont les villageois eux-mêmes qui savent qui est qui et ce sont-eux qui peuvent faire cesser les complicités avec les terroristes Pourquoi aujourd’hui on ne veut pas que nous puissions assurer notre propre sécurité ? je pense que ce n’est pas une armée étrangère qui viendra faire la sécurité pour les burkinabè à leur place, ni Pierre ni Paul ne peut se substituer aux burkinabè dans cette lutte. Que les gens nous aident avec de l’armement et le reste on le fera nous-mêmes. Donc pour moi, les FDS ensemble avec les VDP, c’est la meilleure formule pour gagner cette guerre. Les gens viennent ce n’est pas pour l’argent mais pour la patrie, ce ne sont pas les 60.000francs là qui attirent les gens, non, ils viennent risquer leur vie pour sauver la Nation, je suis convaincu que « notre Wagner, ce sont les VDP », comme l’a dit le Chef de l’Etat. La solution pour cette guerre c’est compter sur nous-mêmes, tout en mutualisant nos forces avec nos pays voisins.
Le Chef de l’Etat vient de s’exprimer sur la situation du pays à travers cette interview télévisée, êtes-vous optimiste ou pessimiste quant-à la suite ?
Moi j’ai retenu une chose, c’est vraiment quelqu’un qui veut que le pays retrouve sa sécurité, ça c’est déjà important ce n’est pas le pouvoir qui l’intéresse, c’est quelqu’un qui sait qu’il est en mission et que cette mission prendra fin donc il se donne tous les moyens pour y arriver. Je me rends compte que nous avons besoin d’avoir du matériel, c’est un cri de cœur et il a montré son ouverture avec tous les partenaires, tous ceux qui peuvent nous aider mais il n’est pas assis attendant l’aide de l’extérieur avant de commencer, il commence avec nos forces et si quelqu’un veut nous aider, on est ouvert à cela, mais on ne va pas marchander notre soutien en faisant allégeance à ceux qui veulent nous asservir, je crois que c’est ce message-là qui était très fort. Notre priorité aujourd’hui, c’est la sécurité du pays et ça passe aussi par la bonne gouvernance. Le jeune-là sais très bien qu’il ne peut pas trahir et je sais qu’il a le sens de l’honneur, du patriotisme et de la dignité et nous espérons qu’il ne fera pas fausse route.
Interview réalisée par M.K
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